La new romance et ses nuances. Marché littéraire, sexualité imaginaire et condition féminine

Author
Publication year
2019
Journal
Revue du Crieur
Volume
12.1
Pages
106-121
Comment

Depuis le succès de 50 Nuances de Grey, le marché de l’édition s’est en partie recalibré autour d’un (sous-)genre, la new romance (ou « romance érotique »), dont les chiffres de vente rivalisent avec les habituels best-sellers de littérature générale ( Musso-Lévy-Nothomb ). Avec des titres comme After, Beautiful ou Calendar Girl, cette tendance éditoriale ne semble, de prime abord, relever que d’une énième stratégie marketing cynique et désincarnée ciblant essentiellement les lectrices ( hétérosexuelles ) et d’une simple évolution, vaguement transgressive, du classique « Harlequin ». Vue d’un peu plus près, elle peut passer pour l’un des signes des revendications des femmes pour l’accès à une autonomie morale, matérielle et sexuelle. Après MeToo et l’affaire Weinstein, cette forme de la culture populaire écrite doit être envisagée comme une zone de conflit où désirs d’émancipation et représentations normatives de la féminité et de la sexualité sont moulinés par une industrie culturelle avide d’intégrer les marges dans le mainstream. (107)

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Il existe des textes qui sortent de ce format classique : les romances « M/M », qui se déclinent également en romances érotiques et mettent en scène les relations entre deux hommes. De même que la romance africaine-américaine, aux États-Unis le M/M est un sous-genre établi de la romance, tandis qu’il demeure une niche en France, dont l’avenir est incertain : Livres Hebdo rapportant que l’un des rares éditeurs français ayant consacré une collection à ce domaine, Milady, a décidé de l’arrêter. (115)